

Par un matin d’hiver (d’après Cornelis van Dalem)
2025
Tempera à l’oeuf et huile sur toile
240 x 180 cm
Le premier plan est plonge dans l’ombre. Dans un hangar abandonné, quatre personnages sont assis sur la gauche; un cinquième s’approche deux en portant un bol de nourriture. Ils apparaissent sous la forme de silhouettes sombres contre un fond extérieur lumineux, encadrés par l’ossature de la construction en bois qui les abrite. Plus loin, une modeste ferme brille d’une lueur sombre. Une porte s’entrouvre et une personne tend quelque chose à un personnage en haillons, probablement un acte de charité envers un mendiant errant.
Wikipédia m’apprend que l’auteur de cette petite scène du milieu du XVI siècle, Cornelis van Dalem, était un marchand aristocrate qui n’avait pas besoin de vivre de son art. Il peignait donc très peu et choisissait ses sujets. Il est intéressant de noter qu’il a représenté la pauvreté non pas d’un point de vue spectaculaire (pas d’ivrognes laids qui se battent), mais avec empathie et dignité.
En même temps, la scène me fait penser à une projection cinématographique. L’extérieur lumineux se compose de trois plans inégaux qui ouvrent sur une autre strate de la réalité, tandis que les personnages du premier plan sont dans la position de spectateurs. Je pense à certaines de mes œuvres dans lesquelles j’explore l’ambivalence entre intérieur et extérieur dans des situations qui évoquent des séances de projection.
Je reprends la structure du tableau, je l’agrandis dans des proportions qui permettent aux spectateurs d’entrer physiquement dans l’espace pictural. Les silhouettes font maintenant face à un extérieur lumineux catapulté dans notre présent, la projection d’une époque cinq cents ans plus tard. Dans cette rencontre, le passé et le présent font référence à la constance de l’existence humaine et des inégalités sociales. (Tim Eitel)
Photo Jean-Louis Losi